Sortie à l’opéra Bastille : Elektra de Richard Strauss

Image du spectacle Elektra de Richard Strauss

 

Les élèves des groupes allemand euro, LVA et LVB en sortie à l’opéra Bastillle

Article rédigé par Théo Tacito (TG)

Les citations apparaissant en couleur sont extraites du programme du spectacle, les citations en italiques sont des passages du livret.

Après avoir assisté à une représentation d’Elektra, du poète viennois Hugo von Hofmannsthal, Richard Strauss décide, avec l’accord de l’écrivain, une adaptation lyrique de la pièce. Elektra, alors inspirée de la tragédie de Sophocle du même nom, voit le jour en 1909.

Dans le cadre scolaire, des classes d’allemand du lycée ont pu profiter de la splendeur de l’opéra de Strauss à l’Opéra Bastille. Ils ont notamment découvert la mise en scène contemporaine de Robert Carsen, sublimée par l’orchestre l’Opéra national de Paris sous la baguette de Semyon Bychkov. « Orchestre monumental, voix poussées dans leurs derniers retranchements, le post-wagnérisme atteint ses plus extrêmes limites et flambe une fois pour toutes en Elektra. »

La grande salle est plongée dans le noir. Hofmannsthal lui-même disait « Elektra est un composé de nuit et de lumière, noir et clair ». Seul un éclairage parcimonieux projette les ombres fantomatiques des personnages et d’Electre, au centre de la scène. Le béton froid, austère et lisse qui sert de décor dévore la pièce. Le profond gouffre de la tombe d’Agamemnon creusé dans la terre meuble et nue absorbe toute lumière. Comme si, nous semblions voir une tombe dans la tombe. Le noir insidieux du trou engloutit tout ; les lumières et même les ténèbres, les corps. L’on voit s’élever ces corps qui dansent autour du néant, grattent la terre comme des bêtes, assoiffés de rage et de vengeance, s’écroulent, se relèvent dans une danse sublime. Le pli du satin noir que caressent les pieds nus ces anges de la mort foule le sol en quête de vengeance, haches à la main. « Dans la cour du palais de Mycènes, les servantes commentent l’attitude d’Electre depuis la mort de son père Agamemnon. Comme elle le fait chaque jour, Electre invoque son père, revit son assassinat, perpétré par sa femme Clytemnestre, aidée par son amant Egisthe, et exulte à l’idée de la vengeance. Sa sœur Chrysothemis, lasse d’une existence où elle ne peut vivre pleinement sa féminité, vient mettre en garde Electre, la pressant de fuir avant que leur mère ne la jette au cachot. Electre la repousse avec mépris. Chrysothémis s’enfuit à l’approche de Clytemnestre, venue s’adresser à Electre, en quête d’un remède contre les rêves qui hantent ses nuits. »

Au tournant du XXe siècle, l’onirique occupe une place centrale, notamment grâce aux travaux de Sigmund Freud, qui lui procure un cadre scientifique. Le rêve devient un territoire à sonder, le lieu des refoulements enfouis dans notre inconscient, le lieu où il est permis à nos désirs de se réaliser. Source d’intérêt dans l’Antiquité pour les Grecs, avides de mystères et de superstitions, le rêve est convoqué à de nombreuses reprises par les personnages d’Elektra, renseignant sur leurs traumas et les cauchemardesques images qui hantent leurs nuits. « Electre suggère d’abord à Clytemnestre, de manière énigmatique, un sacrifice dont la victime serait une femme. Emportée par sa haine, elle finit par révéler à sa mère que la victime ne sera autre qu’elle-même et prédit son trépas, par la hache même qui tua Agamemnon. Chrysothémis revient en pleurs, annonçant la mort d’Oreste, leur frère exilé depuis des années sur les ordres de Clytemnestre. Electre refuse de croire la nouvelle, tandis qu’un serviteur part pour prévenir Egisthe. Déterminée, Electre décide d’accomplir sa vengeance avec sa sœur mais Chrysothémis, horrifiée, refuse de l’aider. Electre se résout à agir seule. Tandis qu’elle recherche la hache qui a tué son père, un étranger approche il dit vouloir voir Clytemnestre afin de lui rapporter la nouvelle de la mort d’Oreste. Pressée de questions, Electre révèle son nom a qui, devant sa douleur, lui avoue qu’Oreste vit toujours. De vieux serviteurs viennent se prosterner aux pieds du jeune homme, en qui Electre reconnaît enfin son frère. » Cette scène de retrouvaille reste mémorable, émouvante ; « les chiens dans la cour m’ont reconnu, et ma sœur ne me reconnaît pas !… ». « Leurs retrouvailles sont interrompues par le précepteur d’Oreste. L’heure est venue et les deux hommes pénètrent dans le palais. Demeurée seule, Electre se désespère de ne pas avoir pu confier la hache à son frère. Le silence est déchiré par le cri terrible de Clytemnestre. En transe, Electre incite son frère à frapper encore. Affolées, les servantes fuient, lorsque Égisthe survient. Electre le guide jusqu’au palais où il tombe à son tour sous les coups d’Oreste. Chrysothėmis apparaît, rendant grâce aux dieux du retour d’Oreste, mais Electre ne l’entend plus. Elle entame une danse et s’écroule. Chrysothėmis, restée seule, appelle Oreste. »

Image du spectacle Elektra de Richard Strauss